Premier stage en rédaction, premiers frissons..
Lors de mon passage à l'Expansion, durant le mois de mars 2010, j'ai eu la l'opportunité de vivre une grève de la rédaction. Un événement suffisamment rare pour être historique, selon les journalistes du groupe. Le point d'orgue de la contestation eut lieu devant la salle où Rick de Nolf, PDG de Roularta Media Group tenait une conférence de presse sur les comptes du groupe.
Banderoles, sitting devant l'entrée des bâtiments, slogans scandés toute la matinée, tous les moyens ont été usés pour que les dirigeants entendent les inquiétudes des salariés qui, à cette occasion, étaient quasi unanimes sur leurs revendications.
La grève a été déclenchée suite à l'annonce par la suppression du poste de rédacteur en chef technique, poste qui n'était visiblement plus en adéquation avec les nouvelles exigences du journal. L'annonce, qui n'avait pas fait l'objet de concertations, a mis le feu aux poudres. Après plusieurs assemblées générales plus ou moins improvisées, des votes à bulletin fermé, des explications avec la direction, les salariés ont décidé de se mobiliser et de manifester devant la salle ou se réunissaient la plupart de l'éxécutif. A la sortie de la conférence de presse, une franche empoignade a opposé Marc Feuillée, directeur de la publication du groupe, et les grévistes, sous les yeux de Rik de Nolf. « Vous êtes irresponsables, vous donnez une bien mauvaise image du titre » s'écriait-il. « Vous ne nous consultez pas avant de prendre de telles décisions, vous ne prenez pas en compte nos inquiétudes » répondaient certains. Les échanges ont duré plusieurs minutes pendant lesquelles la pression était palpable. Quelques minutes intenses que j'ai pu, discrètement, enregistrer à l'aide de mon téléphone, pour les souvenirs..
Après plusieurs échanges de communiqués, la direction a finalement accepté de suspendre la suppression du poste pour une durée indéterminée, ce qui a mis fin à la grève et calmé les esprits. Une petite victoire pour les salariés. Cette grève aura été l'occasion de découvrir un peu plus profondément la réalité de la crise que connait le secteur du journalisme en ce moment, et de découvrir la nature des rapports de force entre les journalistes et leurs directions, parfois contraintes de prendre des décisions contre leur gré.
Emmanuel Colombié