Jean-Pierre, Luc et une stagiaire
Août 2008. Voilà trois mois que je suis stagiaire chez commeaucinema.com. Je finis un article quand la nouvelle tombe. Faute de pigiste disponible, c'est moi qui irais interviewer les frères Dardenne pour la sortie de leur dernier film primé au festival de Cannes, Le Silence de Lorna. Un choc, je suis aussi excitée qu'impressionnée par cette première dans ma « carrière ». Monstres sacrés du cinéma, les deux réalisateurs belges sont rodés à l'art de l'interview. « Fais attention à ne pas les laisser mener l'entretien » me prévient la rédaction. Je passe mon week-end à travailler mes questions : passage en revue de leurs précédentes déclarations, rattrapage sur certains films non visionnés, décorticage de leur dernier long-métrage. J'en suis persuadée, la préparation sera la clef.
Lundi 10h. J'arrive sur le lieu de rendez-vous, un hôtel du Ve arrondissement parisien, armée de mon dictaphone et de mon appareil photo. L'attaché de presse m'accueille et me propose de m'installer dans un petit salon en attendant les réalisateurs. Les deux blonds surgissent soudain. Aussi semblables que des jumeaux, ils paraissent un peu fatigués de cette journée marathon face aux journalistes. « Vous êtes la dernière aujourd'hui » m'annoncent-ils. Première étape, les prendre en photo pour le site, le flash manque de les aveugler. Ils me proposent un verre d'eau, en me servant j'en mets à côté. Rien pour me rassurer au moment où je pose ma première question. Voix tremblante, stress, je sens déjà l'entretien m'échapper. Mais, aujourd'hui les Dardenne sont les interviewés et moi l'intervieweur. Un déblocage et je rentre enfin dans la peau du journaliste. Après avoir tâtonné, je joue mon rôle et mène ma barque. Et si en rencontrant les frères Dardenne, j'avais découvert que l'interview était aussi une question de mise en scène ?
Charlotte Vaccaro